ML pour vivelepcf, 3 novembre 2014
Le coût de la rénovation de l’appartement alloué par la CGT à son secrétaire général Thierry Lepaon est monté en affaire nationale depuis l’article du Canard enchaîné.
L’ensemble des médias aboient. Les autres syndicats ricanent.
Du côté des adhérents de la CGT, beaucoup font part de leur incompréhension, quelques-uns de leur colère.
La fuite du Canard enchaîné reflète un profond malaise dans le syndicat bien plus qu’elle ne le provoque.
Il y a peu encore, les adhérents auraient fait bloc derrière le secrétaire général. D’autant que nul ne peut douter des mauvaises attentions de certains commanditaires du journal satirique avant les importantes élections professionnelles dans la fonction publique et certaines grandes entreprises. Ils auraient, en confiance, attendu les explications publiques de la Confédération.
Elles sont venues. L’appartement ne fait pas 120m2 mais 80. La rénovation, justifiée par son état d’origine, s’est élevée à 130.000 euros et non à 150.000. A Paris, c’est le prix d’une chambre de bonne. Reste néanmoins que cet investissement est consenti pour une simple location. Pourquoi ne pas avoir acheté ?
Mais l’essentiel n’est pas là.
La ligne de Thierry Lepaon suscite un profond malaise dans le syndicat. Contrairement à Bernard Thibault, il ne bénéficie pas de la légitimité acquise par une bataille comme celle de novembre/décembre 1995.
Au contraire de Thibault, Lepaon exprime aussi avec un franc-parler indiscutable ouvertement la position réformiste de son prédécesseur et de la direction collégiale. La main tendue aux syndicats de collaboration ne se cache plus derrière l’euphémisme du « syndicalisme rassemblé ». On l’a vu avec la récente rencontre CGT/CFDT du 8 octobre. Au moment de la grève contre la « réforme ferroviaire », Lepaon est clairement rentré dans la stratégie d’extinction du mouvement, valorisant les concessions bidon du gouvernement. Il avait lui-même consigné en 2012, avant d’être secrétaire national, avec un député UMP, un rapport du Conseil économique et social préparant la mise en concurrence du rail. Une interview dans le Nouvel économiste où il déclare que la CGT « ne doit pas avoir d’opposition de principe au patronat » a également désarçonné plus d’un camarade…
La ligne politique poursuivie par Thierry Lepaon passe d’autant plus mal que c’est le gouvernement de « gauche » qui mène aujourd’hui la politique la plus antisociale, celui issu des élections de 2012 dans la campagne desquelles le syndicat de Bernard Thibault s’était engagé pleinement derrière Hollande, cultivant avec complaisance toutes les illusions.
On sait aussi que le choix puis l’élection de Thierry Lepaon au dernier congrès a résulté d’une longue et obscure opposition de personnes et de clans au sein de l’appareil de la CGT, sans que s’exprime – le moins du monde – chez les prétendants de contestation de la ligne du « syndicat de négociations ». Dans les conditions d’aujourd’hui, cette ligne, désormais incarnée et assumée par Thierry Lepaon, ne peut plus rassembler et faire illusion. Beaucoup de dirigeants syndicaux ressentent le besoin d’adopter des postures plus « à gauche », plus « radicales ».
Le débat doit se rouvrir à tous les niveaux de la CGT. Mais il serait grave qu’au malaise des adhérents, à leurs attentes, des clans dirigeants répondent par une révolution de palais basée sur des coups bas. Va-t-on bientôt lire, que Thierry Lepaon, cardiaque connu, va se retirer pour « raisons de santé » comme d’autres avant dans d’autres pays ?
Les militants syndicaux et politiques soucieux de rendre à la CGT son identité et son efficacité de syndicat de classe révolutionnaires ne peuvent pas accepter que les débats de fond n’aient pas lieu, ne s’expriment pas et ne décident pas de l’avenir de la confédération.