Choose France. Ne pouvait-on faire plus paradoxal comme nom donné à un sommet créé par Emmanuel Macron en 2018, au cours de son premier mandat ? Pour sa 8e édition, le principe ne change pas : accueillir les dirigeants de grandes entreprises pour les convaincre d’investir en France. Avec une petite nouveauté toutefois : jusque-là, il s’agissait d’attirer les investisseurs étrangers. En cette belle année 2025, les investisseurs français. Visiblement, notre président n’est plus à un paradoxe près.
Si le monde tel que nous le connaissons était logique, ne serait-il pas normal que les patrons français fassent profiter leurs concitoyens de leur fortune ? Doivent-ils vraiment attendre la tenue d’un grand sommet pour annoncer qu’ils sont prêts à partager une infime partie du chiffre d’affaires de leur entreprise, en oubliant de spécifier qu’en échange ils bénéficieront d’exonérations d’impôts ou de toute autre compensation d’une valeur défiant toute concurrence ?
L’Oréal est manifestement de cette trempe. En 1965, Liliane Bettencourt inaugurait l’usine Soprocos à Saint-Quentin, d’où sortent de nombreuses marques dont la notoriété n’est plus à faire, que ce soit Elnett, CeraVe, Narta, Vichy ou encore Men Expert, pour un total d’« un million d’unités qui sortent chaque jour pour un catalogue de 1000 références de produits finis » selon le directeur de l’entreprise, Guillaume Delaplace, cité par l’Aisne Nouvelle. A proximité, l’autre usine du groupe installée à Gauchy, Fapagau, est quant à elle spécialisée dans la production de parfums de luxe tels qu’Armani, Prada, Lancôme ou encore Yves-Saint-Laurent.
Malgré les multiples investissements effectués par le groupe ces dernières années dans ses usines françaises, il a fallu attendre ce lundi 17 novembre et la visite du ministre de l’Economie Roland Lescure, accompagné du ministre délégué chargé de l’industrie Sébastien Martin, pour que la grande marque française annonce en grande pompe que 60 millions d’euros seraient investis prochainement dans cette usine Fapagau, afin d’augmenter le nombre de lignes de productions en créant un nouveau bâtiment.
Ce que l’Histoire ne dit pas, – et la presse non plus -, c’est qu’en échange de ces investissements, l’Etat a promis un plan de 30 milliards d’euros pour venir en aide à l’Oréal et aux 149 autres entreprises faisant le choix comme elle de de contribuer à hauteur de quelques millions. Un superbe retour sur investissement en somme, surtout quand on sait que l’Oréal, comme tant d’autres, entreprise française d’origine, possède plus de 40 usines dans le monde, dont 17 en Europe et seulement 11 sur notre sol.
Pendant ce temps, les promesses faites aux salariés de CPF-Itancourt, elles n’aboutissent pas. Xavier Bertrand et Julien Dive avaient beau annoncer une sortie de crise, rien ne se passe. Une preuve supplémentaire, s’il en fallait une, que le sommet Choose France ne sauvera pas la situation industrielle de notre pays : les seuls capables de gagner des combats face au patronat restent les syndicats qui mènent la lutte.