Conseil municipal du 28 septembre 2015
Intervention d’Olivier TOURNAY (PCF)
Rapport n° 9 Armement de la Police Municipale
Monsieur le Maire, Madame Messieurs les Conseillers municipaux
Vous avez proposé en juin d’armer la police municipale…
1) Quel est le rôle de la police municipale ?
Je ne m’attarde pas sur la nécessité ou non d’une police municipale. Ma position en matière de sécurité ne dévie pas, elle incombe à l’Etat et non à une municipalité.
Depuis le début des années 1980, le nombre de polices municipales a doublé. Elles sont implantées dans environ 3500 communes, avec une forte concentration en région parisienne et dans le grand-est.
Leur effectif à quant à lui triplé en 20 ans : environ 18 000 agents auxquels il faut ajouter 1800 gardes champêtres, 3000 agents de Surveillance de la Voie Publique et du personnel annexe.
Les policiers municipaux méritent le respect et la considération qui sont dues aux fonctionnaires territoriaux. Aussi faut-il distinguer les missions des deux polices, nationale et municipale.
La Police municipale, terme forcement impropre car par essence, une police il n’y en a qu’une, doit être une structure de proximité puisque hélas la police nationale ne l’est plus. Elle doit s’attacher à une meilleure connaissance du terrain, à une meilleure relation avec la population. Des missions qui ne justifient en rien le port d’une arme, qui est définit par l’article 132-75 du Code pénal comme étant “tout objet conçu pour tuer ou blesser”. Les polices municipales ne sont pas et ne doivent pas être des palliatifs à un État défaillant.
La police a pour mission de garantir la liberté de chacun, en s’affranchissant du pouvoir politique. Comment cela serait-il possible lorsque cette dernière est placée sous l’autorité d’un seul élu. Les exemples de ville où la police municipale dérive en jouant un rôle qui n’est pas le sien, celui de la police nationale, sont déjà trop nombreux. Et ces pratiques sont hélas encouragées par des élus dont certains cherchent à incarner la sécurité au niveau local.
Et ce rapport crée volontairement la confusion. Deux polices vaudraient-elles mieux qu’une ?
2) Désengagement de l’Etat
En aucun cas, car dès lors qu’une Police Municipale se crée ou va au-delà de ses prérogatives, c’est la Police Nationale qui se désengage de ses missions de services publics en transférant certaines de ses missions à la commune. La lente dérive du désengagement de l’Etat en matière de sécurité publique, j’ai pu la dénoncer à plusieurs reprises en ces lieux : vidéosurveillance dont vous refusez tout audit, voisins vigilants. Ce désengagement, non seulement vous l’accompagnez Monsieur le Maire, mais vous le soutenez. Vous voulez désormais des armes pour la Police municipale, alors même que vous n’avez rien fait, bien au contraire lorsque l’on a retiré des postes à la Police Nationale de Saint-Quentin, pendant le quinquennat de Nicolas Sarkozy.
Cet armement de la Police Municipale aura nécessairement d’ailleurs un coût pour le budget de la ville (achat des armes et des munitions, formation des agents…). Vous vous plaignez Monsieur le Maire des baisse de dotations de l’Etat, mais voilà à quoi vous voulez utiliser l’argent public. A l’achat d’armes.
De plus, lorsqu’une commune est confrontée à une double police, la population paie deux fois. Une fois, à l’Etat pour son rôle régalien de garant de la sécurité publique, et une fois à la commune.
3) Des dérives
Revenons aux dérives. Ayons en mémoire ce qui s’est passé dans d’autres villes et est-ce vraiment de ce type d’exemple que l’on veut s’inspirer ?
Rappelons-nous de Vitrolles sous l’ère de Bruno Megret : il a armé la police municipale de magnum 357. En une année, le parquet a relevé plus de 150 incidents entre des particuliers et la police municipale. Ou alors, est-ce Beziers et son actuel maire Robert Ménard qui vous inspire ? Lui qui axe également sa politique et sa communication sur l’armement de la police municipale. Est-ce Nice qui vous inspire ? Ville de votre ami politique Christian Estrosi et dont les dérives de sa police municipale ont été épinglés par des magistrats comme Eric de Montgolfier.
Même Alain Bauer, chantre de l’utra-sécuritaire est dubitatif quant à l’armement de la police municipale.
4) Des armes pour rassurer la population ?
Le documentaire «Bowling for Columbine» démontre bien qu’aux Etats-Unis, la liberté de port d’arme induit un climat de peur générale alors qu’au Canada, l’absence d’objets pouvant tuer en libre circulation permet à la population de vivre sereinement. Inutile de mentionner le nombre insoutenable de morts par armes à feu aux Etats-Unis et les bavures de la police, notamment municipale. Vous parlez de formation à l’armement dans ce rapport. Est-ce bien sérieux de mettre en avant 4 séances de formations, alors que dans la police nationale, cette formation s’effectue sur une année entière ? Je rappellerai juste pour mémoire que les policiers anglais nationaux, eux ne portent pas d’armes à feu. Sont-ils plus en danger qu’ailleurs ? Les gouvernements anglais successifs seraient-ils de joyeux utopistes en la matière ?
Monsieur le Maire, campagne des régionales oblige, vous cédez à la facilité de rentrer dans les thématiques de l’extrême droite, quitte à nier les conséquences d’une telle politique sur les valeurs d’humanité que votre parti «les Républicains» porte en cocarde.
Ce n’est pas de policier municipaux armés dont la ville a besoin, mais d’éducateurs de rue, de gardiens de gymnases, de concierges dans les immeubles, de cesser de fermer les centres de loisirs le matin. Alors assez de cette politique spectacle.